Aurélie Trouvé : « Il faut désobéir aux traités »
- Écrit par Aurélie Trouvé
Changer l’Europe sans pour autant précipiter la France vers la sortie : Attac veut mobiliser sur une troisième voie, impliquant la construction d’alliances avec d’autres pays.
Faut-il sortir des traités ?
Aurélie Trouvé : Il faut désobéir. Aux traités, mais également à toutes les règles qui empêchent de mener une politique progressiste, en rupture avec le néolibéralisme économique. Il ne s’agit pas de désobéir à toute l’Europe, mais de rompre avec les règles qui ne vont pas dans le sens de l’intérêt général. Nous devons cesser de penser que nous ne pouvons pas mener telle ou telle politique parce que l’Europe nous en empêche.
Les gouvernements et les collectivités locales doivent enfreindre certaines règles extrêmement contraignantes. En premier lieu, le carcan budgétaire de l’UE, matérialisé par la règle des 3 % de déficit, qui empêche toute politique budgétaire ambitieuse. Cela pourrait également passer par la mise en place d’une politique de contrôle des capitaux.
Autre exemple : la France vient d’annoncer qu’elle s’opposait à la reprise des négociations commerciales avec les États-Unis. Mais elle ne dispose pas d’une minorité de blocage et ne pourra donc pas empêcher l’adoption d’un accord de libre-échange qui s’appliquera sur son sol. Dans un tel cas de figure, nous devons chercher des alliances pour nous y opposer et, éventuellement, prendre des décisions contre l’avis de l’UE.
Ces actes de désobéissance doivent être assumés et coopératifs à l’échelle européenne, au nom de l’intérêt général. Dans le domaine agricole, par exemple, la santé des citoyens doit nous pousser à sortir des pesticides, mais, tandis que nous expliquons aux agriculteurs qu’ils doivent arrêter d’utiliser des produits phytosanitaires, il faut être cohérent et refuser d’importer des produits traités. Cela suppose donc de désobéir aux règles européennes du droit de la concurrence et à celles du marché commun.
Faut-il aller jusqu’à la sortie de l’Union européenne et de l’euro ?
La sortie ne serait qu’une solution en dernier recours. Une issue non coopérative et unilatérale serait douloureuse sur le plan économique et social. Par ailleurs, nous avons besoin d’une Europe politique et sociale forte parce que, dans un capitalisme financier mondialisé, nous devons être suffisamment puissants politiquement face aux multinationales. Et l’Europe politique pèse beaucoup plus que la France seule. De même, nous avons besoin d’une Europe politique qui ait du poids dans les négociations climatiques internationales ou dans les négociations commerciales pour imposer une nouvelle vision. Ce n’est évidemment pas le cas de l’Europe actuelle, mais il ne faut jamais perdre cet espoir.
Nous prônons donc plutôt de rester au sein de l’Union mais de taper du poing sur la table au nom de l’intérêt général, tout en essayant de construire des alliances avec d’autres pays. L’alternative doit donc se situer à mi-chemin entre le jeu institutionnel actuel, qui ne permet pas de s’opposer au néolibéralisme économique, et la sortie.
N’y a-t-il pas un risque de réactions en chaîne des autres pays européens ?
Il est sûr que cela demandera un rapport de force extrêmement rigoureux et une volonté politique très forte. Nous avons vu ce que la désobéissance aux traités pouvait donner avec la Grèce, dont le gouvernement a finalement cédé contre l’avis de son peuple. La France a évidemment un autre poids politique que la Grèce, mais il lui faudra avancer de manière très volontaire, autant que possible en s’alliant avec d’autres pays, et que ce processus soit porté par des mouvements sociaux d’ampleur dans les pays européens. C’est la raison pour laquelle Attac, comme beaucoup d’autres organisations, travaille à des alliances européennes.
Enfin, nous devons combattre la fatalité d’une Europe néolibérale qui nous empêcherait d’agir au niveau national. Oui, nous pouvons désobéir à l’Europe néolibérale et imposer d’autres voies. C’est essentiel de porter ce message, car la réaction qui monte aujourd’hui face à l’Union européenne est une réponse xénophobe, raciste et nationaliste, qui n’est pas moins néolibérale par ailleurs.
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Le G7 a déjà sauvé le monde plusieurs fois
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Dès 1975, ils stabilisèrent l’économie mondiale. Une réussite.
En 1980 à Venise, ils décidèrent d’éradiquer le terrorisme international. Avec succès. Suite à ses premiers résultats, le G7 décida d’élever son ambition? : assurer le développement des pays du Sud. Pour cela, dès 1979, le G7 invita la Banque mondiale et le Fonds monétaire international à mettre en œuvre des « ?plans d’ajustement structurel? ». La tâche était ardue. L’invitation fut donc maintenue tout au long des années 1980 afin d’instaurer une économie de marché dynamique et de lever les obstacles qui empêchaient jusque-là les pays pauvres d’être prospères.
Comme chacun sait, le succès fut là aussi au rendez-vous et le G7 se congratula. Il régnait sur le reste du monde. La pauvreté mondiale explosa? ? En 2005, à Gleneagles en Ecosse, la rock star Bono obtint du G7 que celui-ci « ?en finisse avec la pauvreté? » (Make poverty history). Les résultats furent immédiats. Tout comme en matière environnementale. Dès 1986 à Tokyo, puis à Moscou en 1996, le club des 7, puis des 8, garantit au reste du monde la sûreté nucléaire civile et la fin de la prolifération nucléaire militaire. Depuis, nous sommes débarrassés de ces risques-là, n’est-ce pas ? Quant au réchauffement climatique, le G8 de l’Aquila en 2009 y a mis fin en le contenant en-deçà de 2?°C et en réduisant ses propres émissions de 80?% d’ici à 2050.
Le G7 est désormais en manque de défis systémiques. Les commentateurs sont déboussolés. Ils en sont réduits à se demander si le G7 n’est pas devenu un G1+6, consacrant la puissance américaine face à l’impuissance européenne, ou un G6+1, indiquant l’isolation des États-Unis face à l’affirmation des six autres pays membres historiques du G7.
Théâtre annoncé des divisions entre « ?puissances occidentales? », le prochain G7 masque mal l’impasse dans laquelle il nous enferme? : défendre le monde tel qu’il est plutôt qu’inventer le monde de demain, celui qui pourrait résoudre les grands défis auxquels nous sommes confronté·e·s. Des défis que le G7 ne saura résoudre. Son histoire est là pour en attester.
La taxe GAFA une fausse solution à l'évasion fiscale
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