La fake news de Macron

Écrit par Marc Web
Publication : 2023-01-04 21:45:34

« Je repense aux vœux que je vous présentais à la même heure il y a un an […] qui aurait pu prédire la crise climatique aux effets spectaculaires encore cet été dans notre pays ? »
 
Cette phrase hallucinante a été prononcée le samedi 31 décembre dernier par le chef de l’État lors de ses traditionnels vœux télévisés.

Quelques mots devant des millions de Français·es qui laissent entendre que le changement climatique est un événement inattendu.
 
« Dire en 2022 qu’on ne savait pas, c’est simplement une fake news », s’est désespérée Magali Reghezza-Zitt, géographe membre du Haut Conseil pour le climat, un organisme qui a vocation à apporter un éclairage indépendant sur la politique climatique du gouvernement et créé en 2018 par… Emmanuel Macron.

 

macrongiec

Le premier sommet de la Terre a eu lieu en 1972.

L’audition devant le Sénat américain du climatologue de la Nasa James Hansen qui créa la première onde de choc médiatique mondiale à propos du changement climatique date de 1988.


Le Giec a publié son premier rapport en 1990. Et depuis 1995, vingt-sept COP, les sommets climatiques internationaux, se sont déroulées, dont celle de 2015 à Paris.

Que personne dans l’entourage du président de la République n’ait relevé cette phrase d’un discours relu et enregistré est révélatrice de la non-volonté de l’exécutif de prendre en considération l’enjeu climatique.

Pis, Emmanuel Macron conforte le discours des tenant·es du business as usual.

Comme l'a rappelé le chercheur Christophe Cassou, auteur principal du dernier rapport du Giec :

« À quoi servent nos travaux si en public, devant les millions de Français, les dirigeants, qui fixent le cap de l’action climatique, accréditent le "on ne savait pas", si chers aux partisans de l’inaction et du statu quo ? »

Le climatologue Jean Jouzel a pourtant présenté à l’Élysée en 2013, et en présence d’Emmanuel Macron, alors secrétaire général adjoint de François Hollande, les conclusions du cinquième rapport du Giec.

En mai et en août dernier, c’était au tour de Valérie Masson-Delmotte, également climatologue et coprésidente d’un des groupes de travail du Giec, d’être invitée au siège de la présidence française pour alerter sur les conséquences du changement climatique qui s’aggravent.

Bien loin de la désinformation climatique instillée par Emmanuel Macron, la réalité des faits durant l’année qui vient de s’écouler s’avère terrible.

En 2022, la France n’a quasiment pas réduit ses émissions de gaz à effet de serre. Et des milliers de personnes sont mortes après les trois canicules de l’été dernier.

Comme l’avait averti en 2021 le Haut Conseil pour le climat : « Les deux tiers de la population française sont déjà fortement ou très fortement exposés au risque climatique. »


Encore fallait-il qu’Emmanuel Macron lise les rapports de l’organisme indépendant qu’il a lui-même lancé.

 


 

Mickaël Correia

Après avoir collaboré pour Le Monde Diplomatique, Le Canard Enchaîné, La Revue du Crieur et Mediapart, je rejoins la rédaction de Mediapart en mars 2021.

Je travaille sur comment est adressée la question du climat dans les cercles de pouvoir politique et économique ainsi que sur les blocages et conflits d’intérêts qui entretiennent le statu quo en matière de lutte contre le chaos climatique.

Par ailleurs, je suis l'auteur de Une Histoire Populaire du Football (La Découverte, 2018), et de Criminels climatiques. Enquête sur les multinationales qui brûlent notre planète (La Découverte, 2022).