Réforme des Retraite, les jeunes manifestent

Écrit par Marc Web
Publication : 2023-01-20 11:13:59

retraitejeunes

Ils et elles ont 18, 20 ou 23 ans, et leur avenir les préoccupe. L’horizon d’un départ en retraite à l’âge de 64 les plonge dans un état de « colère ». Une angoisse face à l’avenir qui les pousse à agir. Parce qu’ils « ne s’imaginent pas travailler plus longtemps » et espèrent qu’une « définition du travail » est « possible », manifester contre la réforme des retraites frôle « l’évidence » disent-ils.

Contrairement aux Marches pour le climat où elles déferlent en nombre, jeudi 19 janvier, à Paris, on aperçoit quelques jeunes pousses parmi toutes les classes d’âge.

Fait inédit depuis douze ans, tous les syndicats ont réussi l’union parfaite : ensemble, ils ont rassemblé plus de 1,12 million de personnes en France, selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, et plus de 2 millions selon les organisateurs. Un premier coup de boutoir pour une « puissante mobilisation dans la durée », afin d’empêcher tout recul de l’âge légal de départ à la retraite, fixé par le gouvernement à 64 ans. Sans compter qu’en 2020, aidée par la pandémie, la contestation l’avait emportée.

Il est bientôt 14 heures place de la République, à Paris, et le cortège de la manifestation contre la réforme des retraites va bientôt démarrer de la place de la République pour rallier celle de la Nation. Pablo, porte-parole de Fridays for Future, attend ses amis devant une brasserie. À 18 ans, cet étudiant en économie exclut l’idée de pouvoir « travailler toute la majeure partie de [sa] vie ». « Se battre contre le réchauffement climatique, c’est aussi lutter afin de pouvoir profiter de notre avenir », dit-il d’un ton enthousiaste.

À sa gauche, Louise, 19 ans, abonde dans le même sens. Dans sa main, une pancarte floquée d’un slogan qui sonne le tocsin : « À chaque étape de la vie, la macronie est pourrie. »

Parce que la réforme des retraites « se veut dans la droite lignée d’un système capitaliste néolibéral » suivant lequel « il faudrait produire plus pour consommer toujours plus », elle marche aujourd’hui pour « défendre la sobriété ».

Consciente des embuches à venir, la jeune femme a mis en pause ses études en sciences politiques pour se former à l’activisme politique. « Le problème actuel, c’est que notre agenda politique est verrouillé par tout un tas de sujets autres que la question climatique. L’urgence face au recul des droits sociaux fait que l’on ne peut pas être efficace sur tous les dossiers », regrette la militante de Fridays for Future, tout en avalant une bouchée de son sandwich.

« On ne peut pas faire d’écologie sans faire de social »

Au milieu du cortège en direction de la place de la Nation, Lola, 25 ans, se veut plus optimiste. Sous son drapeau affichant un sablier, symbole du mouvement écologiste Extinction Rebellion (XR), elle mentionne, au contraire, « une lutte qui rassemble ». « On ne peut pas faire d’écologie sans faire de social », souffle-t-elle d’une voix saccadée.

La plupart des jeunes rencontrés ce jeudi font un constat : l’allongement de la durée du travail va durement affecter les métiers les plus précaires et pénibles. « On ne peut pas laisser mourir les ouvriers ! » affirme Ewen. À tout juste 18 ans, il accumule déjà une certaine expérience en manifestation, dans la droite lignée d’un héritage familial marqué traditionnellement « à gauche », confie-t-il. Ce jeudi, il est catégorique : « Économiquement, cette réforme n’aide en rien. »

À ses côtés, son ami Mathys marche en pensant à son père et à son frère, tous deux soldats du feu. « Leurs conditions de travail ne cessent de se dégrader, ils réalisent de plus en plus d’interventions qui dépassent leur cœur de métier. Pour autant, pompier n’est pas reconnu comme métier à risque, vous le saviez ça ? » nous dit-il d’un ton las.

D’autant plus que l’espérance de vie d’un pompier est inférieure de sept ans à la moyenne nationale (85,2 ans pour les femmes, 79,3 ans pour les hommes). Preuve de son soutien, le jeune homme manque même quelques cours pour lutter contre la réforme. « Et pourtant, nous, les lycéens, nous ne sommes même pas comptés en tant que grévistes », sourit-il, une canette de bière à la main.

En début de cortège, Louri Chrétienne, lui, n’a pas eu besoin de « sécher » quoi que ce soit. Le blocus qu’il a initié devant son lycée parisien n’a pas eu l’effet escompté. Pour cause : « Tous les lycées ont dû fermer les uns après les autres tellement nous comptons d’enseignants grévistes », se réjouit-il derrière ses mèches bouclées recouvrant son front. Du haut de ses 17 ans, il est le président de la Fédération indépendante et démocratique lycéenne (FIDL). Le but de sa présence ? « Montrer notre solidarité avec les vieux », plaisante-t-il du tac au tac. Avant de prendre un air plus sérieux : « Et défendre notre droit à partir à la retraite en bonne santé. »

Quelques mètres plus loin, un groupe d’étudiants de la prestigieuse École normale supérieure (ENS) saute sur place au son de « anti, anti, anticapitalistes ». Lorsqu’on l’interroge sur les raisons de sa présence ce jeudi, Clémence, 22 ans, se dit « désarçonnée », comme si la réponse relevait de l’évidence : la construction d’un mouvement qui espère sonner le glas de « la destruction des acquis sociaux menée par Emmanuel Macron ».

Après une première journée réussie, les organisations syndicales prévoient une deuxième journée de mobilisation mardi 31 janvier.